Ne pas perdre Espoir… et s’indigner pour transformer 💡✅🌀

#Affects

Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue et co-présidente du groupe de travail I du GIEC, nous rappelle dans une interview pour le CNRS :

 

“Une rĂ©cente Ă©tude allemande montre d’ailleurs que l’on retrouve souvent des caractĂ©ristiques communes chez les climatosceptiques, comme une idĂ©ologie d’extrĂȘme-droite, un genre masculin, et une difficultĂ© Ă  gĂ©rer des Ă©motions dĂ©sagrĂ©ables liĂ©es Ă  un sentiment de responsabilitĂ© personnelle ou de culpabilitĂ©, ou Ă  la perte de certains privilĂšges” (voir par ex. Wullenkord, 2022).

 

Nous voyons les actuelles tempĂ©ratures trĂšs trĂšs Ă©levĂ©es, avec 50 °C enregistrĂ©s au Pakistan et plus de 47 °C en Inde d’un cotĂ©. Et, aussi d’autres impacts au Canada, en Australie, etc



La France n’est pas en reste avec dĂ©jĂ  des sĂ©cheresses dans plusieurs rĂ©gions… 

—> Voir pour des dĂ©tails sur les dĂ©gĂąts multilatĂ©raux humains et environnementaux dans l’Atlas de l’AnthropocĂšne (Gemenne, 2021; Gemenne et al., 2019).

đŸ§ âœŽïž Comme l’exposait Spinoza, ce sont des affects communs qui peuvent nous conduire Ă  des changements


Comprendre que l’essentiel est le dĂ©sir…
Et ce dĂ©sir, Spinoza l’appelle le “conatus”, l’effort
 pour persĂ©vĂ©rer dans son ĂȘtre.

Ce dĂ©sir est un mouvement global de l’individu, c’est l’individu en entier
 Entier de ces efforts pour exister.

DĂšs lors, une nouvelle dynamique de convergence passionnelle peut conduire Ă  la formation de nouveaux affects communs, par adhĂ©sion affective, et activation de notre ”conatus” (voir aussi le concept de la “potentia multitudinis” de Matheron, 1969)⚙

Cette force issue de cette action collective, Spinoza la nomme “imperium”…
“Ce droit que dĂ©finit la puissance de la multitude, on l’appelle gĂ©nĂ©ralement imperium” (TP, II, 17).

Aussi, Gilles Deleuze, en exégÚte et amateur de Spinoza, rappelait en 1977 dans ses Dialogues avec Claire Parnet (2008: 76) :


“Le pouvoir exige des corps tristes. Le pouvoir a besoin de tristesse parce qu’il peut la dominer. La joie, par consĂ©quent, est rĂ©sistance, parce qu’elle n’abandonne pas. La joie en tant que puissance de vie, nous emmĂšne dans des endroits oĂč la tristesse ne nous mĂšnerait jamais”.

 

Cet engouement pour ne pas perdre espoir, Noam Chomsky nous invite y Ă©galement (Chomsky & Polychroniou, 2017: 308)



–> “We have two choices. We can be pessimistic, give up, and help ensure that the worst will happen. Or we can be optimistic, grasp the opportunities that surely exist, and maybe help make the world a better place. Not much of a choice.”
–> “Nous avons deux choix. Nous pouvons ĂȘtre pessimistes, abandonner et aider Ă  faire en sorte que le pire se produise. Ou nous pouvons ĂȘtre optimistes, saisir les opportunitĂ©s qui existent sĂ»rement et peut-ĂȘtre aider Ă  rendre le monde meilleur.”

 

Nous avons notre rÎle à jouer dans ce défi collectif, et dans la construction de cette expérience émotionnelle plus positive et plus activée.

#ClimateChange #AnotherWorldIsPossible

 

REFS :
– Chomsky, N., & Polychroniou, C. J. (2017). Optimism Over Despair: On Capitalism, Empire and Social Change (1er Ă©dition). Penguin Books Ltd.
– Deleuze, G., & Parnet, C. (2008). Dialogues [1977]. Flammarion.
– Gemenne, F. (2021). GĂ©opolitique du climat: Les relations internationales dans un monde en surchauffe. Armand Colin.
– Gemenne, F., Rankovic, A., Zalasiewicz, J., & Latour, B. (2019). Atlas de l’anthropocĂšne. Sciences Po.
– Matheron, A. (1969). Individu et communautĂ© chez Spinoza. Les Editions de Minuit.
– Spinoza, B., & Pautrat, B. (2013). TraitĂ© politique. ALLIA.

Valérie Masson-Delmotte :
https://www.lsce.ipsl.fr/Phocea/Pisp/index.php?nom=valerie.masson

Commentaires :
Peut-on avoir la rĂ©fĂ©rence de l’étude sur les caractĂ©ristiques des climetosceptiques ?
–> Bonjour et merci Audric, tu pourras trouver cela dans l’article du CNRS en lien ou bien ces refs 😉👍
– Feygina, I., Jost, J. T., & Goldsmith, R. E. (2010). System Justification, the Denial of Global Warming, and the Possibility of “System-Sanctioned Change.” Personality and Social Psychology Bulletin, 36(3), 326–338.
– JylhĂ€, K. M., Cantal, C., Akrami, N., & Milfont, T. L. (2016). Denial of anthropogenic climate change: Social dominance orientation helps explain the conservative male effect in Brazil and Sweden. Personality and Individual Differences, 98, 184–187.
– Lamb, W. F., Mattioli, G., Levi, S., Roberts, J. T., Capstick, S., Creutzig, F., Minx, J. C., MĂŒller-Hansen, F., Culhane, T., & Steinberger, J. K. (2020). Discourses of climate delay. Global Sustainability, 3, E17.
– McCright, A. M., & Dunlap, R. E. (2011). Cool dudes: The denial of climate change among conservative white males in the United States. Global Environmental Change, 21(4), 1163–1172.
– Milfont, T. L., Abrahamse, W., & MacDonald, E. A. (2021). Scepticism of anthropogenic climate change: Additional evidence for the role of system-justifying ideologies. Personality and Individual Differences, 168, 110237.
– Norgaard, K. M. (2019). Making sense of the spectrum of climate denial. Critical Policy Studies, 13(4), 437–441.
– Stoll-Kleemann, S., & O’Riordan, T. (2020). Revisiting the Psychology of Denial Concerning Low-Carbon Behaviors: From Moral Disengagement to Generating Social Change. Sustainability, 12(3), 935.
– Wagener, A. (2020). Internet contre Greta Thunberg: Une Ă©tude discursive et argumentative. Argumentation et Analyse du Discours, 25, Article 25.
– Wullenkord, M. C. (2022). From denial of facts to rationalization and avoidance: Ideology, needs, and gender predict the spectrum of climate denial. Personality and Individual Differences, 193, 111616.
– Wullenkord, M. C., & Reese, G. (2021). Avoidance, rationalization, and denial: Defensive self-protection in the face of climate change negatively predicts pro-environmental behavior. Journal of Environmental Psychology, 77, 101683.
–> Le pouvoir exige tout autant des corps enthousiastes
L’espoir est une lame tout aussi tranchante que la peur
Les livres d’histoire-gĂ©ographie regorgent de prĂ©cĂ©dents
Mettre la charrue du cosmocentrisme diffus avant les bƓufs de la morale n’a jamais hĂątĂ© la venue du Royaume de la vĂ©ritable Joie
L’Ă©tude allemande utilisĂ©e pour appuyer votre pensĂ©e spinoziste n’est-elle pas en quelques sortes la dĂ©monstration de ce qu’elle semble dĂ©noncer : une objectivation de l’autre
J’ai toujours Ă©tĂ© surpris de constater un certain lien entre les philosophes de la Joie et le tragique, voire le fatalisme
DHM

–> Bonjour et merci Philippe 👍🙏 vous dites “le pouvoir exige tout autant des corps enthousiastes”… et bien quel pouvoir ??

Oui, les institutions captent les affects collectifs pour en crĂ©er une “puissance de la multitude” (potentia multitudinis).

L’espoir, que je diffĂ©rencie de l’espĂ©rance transcendante, est une force immanente de rĂ©silience, mais surtout un formidable levier d’indignation (voir Matheron, 1969).

Ainsi, dans l’indignation, le conatus vient lutter contre les effets des passions tristes. DĂšs lors, pour persĂ©vĂ©rer dans son ĂȘtre, l’individu accumule suffisamment de puissance pour renverser la tristesse et en comprend mieux ses effets (la force de la raison et des connaissances chez Spinoza).

Aussi, l’objectivation est une dĂ©marche scientifique que je dĂ©fends. Pour Spinoza, la puissance rĂ©flexive de notre pensĂ©e nous permet de nous observer et donc, de nous objectiver, se nous constituer en tant que personne.

Spinoza en bon matĂ©rialiste et adoptant une rigueur dans sa dĂ©marche de pensĂ©e ne comprendrait pas votre “fatalisme”, au contraire il dĂ©fend la causalitĂ© des Ă©vĂ©nements đŸ˜‰â˜€ïž